Géopolitique en méditerranée : Un temps pour déchirer, un temps pour coudre
En mai 2025, plusieurs évolutions diplomatiques majeures – la levée des sanctions sur la Syrie, le désarmement du PKK et la reprise des pourparlers russo-ukrainiens à Istanbul – convergent avec l’épuisement des logiques miliciennes en Libye pour dessiner un possible tournant géopolitique. Sous l’égide des puissances extérieures (Etats-Unis, Russie, Turquie, acteurs du Golfe) et face à l’effondrement du statu quo interne, l’idée d’un Etat libyen unifie intégrant le maréchal Khalifa Hatra se dessine désormais comme la voie la plus probable.
Un contexte régional redessine par les grandes puissances
La levée annoncée des sanctions américaines sur la Syrie ouvre la voie à son retour dans le concert régional et offre un précèdent pour la réintégration de la Libye dans les circuits diplomatiques et économiques formels. La dissolution officielle du PKK, validée lors de son 12e congres et supervisée par les services turcs, marque la fin d'un conflit de quarante ans et libère la frontière sud de la Turquie d'une menace inscrite au cœur du grand Moyen-Orient. La reprise des entretiens directs entre Moscou et Kiev a Istanbul traduit le regain d'influence diplomatique d'Ankara et rééquilibre les rapports de force selon les principes de l'équilibre des puissances décrit par Kenneth Waltz, qui prédit que les alliances se forment pour maximiser la sécurité des Etats dans un système anarchique.
Un Etat-pivot : la Turquie comme médiateur
Ankara, longtemps perçue comme partie prenante en Libye, se repositionne en garant de la stabilité régionale. Ses négociations avec l'Est libyen et la reconnaissance progressive de l'Armée nationale libyenne (ANL) répondent à la logique du néoréalisme défendue par Waltz : face à l'anarchie, les Etats cherchent un ordre minimal garantissant leur sécurité. Cette médiation active s'inscrit également dans la stratégie de "puissance pivot", ou la Turquie convertit sa proximité géographique en levier diplomatique et militaire.
Epuisement des logiques miliciennes
Le 12 mai, Abdel Ghani al-Kikli ("Gheniwa"), commandant de la Stability Support Apparatus, a été assassine lors d'une embuscade planifiée par une brigade pro-Tripoli, declenchant des affrontements d'une rare intensité à Tripoli - six morts selon Stratfor et plusieurs dizaines de blessés selon l'International Crisis Group - illustrant l'impossibilité de maintenir deux administrations paralysées par des forces armées rivales. Ces violences confirment l'échec des dispositifs hybrides et imposent l'urgence d'un monopole étatique de la violence légitime.
Convergence des puissances en faveur d'un Etat unifié
Les Etats-Unis, via l'US Africa Command, ont rencontre Haftar a Benghazi pour souligner l'importance d'une solution inclusive sous l'égide de l'ONU. La Russie, par la voix de Vladimir Poutine, a plaidé pour la participation de Haftar dans une configuration gouvernementale stable et fonctionnelle. Les acteurs du Golfe, y compris les Emirats, réorientent leurs soutiens vers un budget national unifie garantissant une redistribution équitable des revenus pétroliers. Cette coalition informelle incarne la recherche d'un nouvel équilibre conforme au réalisme structural : les grands Etats adaptent leurs alliances pour prévenir le vide stratégique et protéger leurs intérêts.
Impacts sur l'Algérie et la Tunisie
Selon la théorie de l'interdépendance complexe de Keohane et Nye, la stabilisation de la Libye réduira les trafics transfrontaliers et renforcera la coopération sécuritaire entre Alger et Tripoli, favorisant la lutte contre la criminalité organisée et l'immigration clandestine. Pour Tunis, l'ouverture des routes commerciales et l'afflux d'investissements contribueront a relancer son économie, jusque-là fragilisée par la crise libyenne.
Ce profond réalignement externe, conjugue a l'épuisement interne des logiques miliciennes, crée les conditions d'un rééquilibrage géopolitique en Méditerranée : la restauration d'un Etat libyen unifie, structure selon une représentation équitable de ses régions et intégrant ses principaux chefs militaires, apparait comme le seul remède durable à la fragmentation actuelle. La réussite de ce modelé dépendra désormais de la mise en œuvre effective des accords de sécurité et de la conduite du prochain sommet international à Paris.
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